- MUQADDASI
- MUQADDASIMUQADDAS 壟 ou MAQDIS 壟 AL- (mort apr. 1000)Le maître, avec Ibn ネawqal, de la géographie arabe de son temps, al-Muqaddas 稜 ou al-Maqdis 稜, du nom de Jérusalem (Bayt al-muqaddas ou Bayt al-maqdis), est l’auteur de La Meilleure Répartition pour la connaissance des provinces (A ムsan at-taq s 稜m f 稜 ma‘-rifat al-aq l 稜m , 1906; Description de l’Occident musulman au IVe/Xe siècle, par al-Muqaddas 稜 , 1950; La Meilleure Répartition ..., 1963).Ayant reçu une solide éducation traditionnelle, notamment en matière de droit, Muqaddas 稜 a dû quitter sa Palestine natale dès la fin de son adolescence, pour une série de voyages qui semblent s’être situés dans la partie orientale du monde musulman, de l’Arabie au Khur s n en passant par l’Irak et le plateau iranien. C’est à Sh 稜r z qu’il compose son livre, en 375, soit sensiblement à l’époque où Ibn ネawqal achève de réviser le sien. Comme pour Ibn ネawqal, le moyen du voyage a sans doute été le commerce, et les sympathies sh 稜‘ites sont évidentes, notamment pour le califat f レimide du Caire. Depuis longtemps, un consensus justifié a placé Muqaddas 稜 au tout premier rang des géographes arabes. S’inscrivant dans la lignée qui va de Balkh 稜 à Ibn ネawqal en passant par I ルレakhr 稜, il porte le genre de la description des pays d’Islam à une ampleur et à une originalité incontestables.Un concept domine toute cette œuvre, un concept latent jusqu’à Muqaddas 稜, mais dont il semble, lui, tout à fait conscient: celui du domaine de l’Islam (mamlakat al-Isl m ), lequel lui paraît devoir, par sa place éminente sur la terre et dans la civilisation, mériter l’intégralité et l’exclusivité de ses efforts. Les vieux thèmes de la description du globe sont définitivement relégués dans l’introduction de l’ouvrage. Mais celle-ci s’étoffe d’autres chapitres: sur le contenu de la connaissance géographique, sur sa bibliographie, sa méthodologie et son vocabulaire, sur les mers et fleuves du globe, sur les variations lexicales d’un même terme, sur les traits dominants des différents pays musulmans, sur les écoles religieuses, sur les aventures vécues par l’auteur, sur quelques sites légendaires controversés, sur le découpage des différentes circonscriptions administratives et géographiques, sur les climats et, enfin, sur une présentation d’ensemble de l’empire de l’Islam.Dès le début, donc, l’ouvrage de Muqaddas 稜 tranche sur ceux de ses prédécesseurs par une conscience très vive du but poursuivi ainsi que par l’intervention d’une personnalité originale. Ainsi Muqaddas 稜 n’est pas le premier à ne citer que pour mémoire les climats de la tradition grecque, il ne fait que s’installer dans la voie ouverte par Balkh 稜, l’iql 稜m devenant un des grands pays qui composent l’Islam. Mais l’auteur ne se satisfait pas de ce découpage: il entend cerner de plus près la notion de pays ainsi définie. Ce sera un territoire original par son cadre naturel, son peuplement, ses coutumes et, par conséquent, ayant vocation à être regroupé sous un seul et même pouvoir politique, que celui-ci soit encore en place ou qu’il appartienne à une histoire révolue. À l’intérieur de chaque pays, le classement se poursuit: à la tête de chaque pays ainsi délimité, ou province (iql 稜m ), une métropole (mi ルr ) dont relèvent une série de districts (k ra ), chacun autour d’une cité (mad 稜na ). Innovation fondamentale: ce découpage se veut fidèle, d’abord, à la réalité des choses beaucoup plus qu’à celles de la politique. En outre, certaines circonscriptions, trop vastes pour être négligées en tant que telles, et néanmoins trop exiguës pour constituer respectivement une k ra ou un iql 稜m particuliers, reçoivent une position à part dans le classement: canton (rust q ) et région (n ムiya ). Enfin, intervient de-ci de-là une terminologie plus spécialisée, faisant référence à quelques situations particulières relevant du cadastre, du peuplement, du climat, de l’administration ou de la position aux frontières.Mais quel est le propos de cette géographie? Il n’est que de se référer à l’auteur lui-même, dans un des chapitres de sa préface: nous y voyons, à travers les rubriques évoquées, que la géographie doit être à la fois physique, économique, administrative, historique, religieuse et, plus généralement, «coutumière». Autre innovation, de province à province, une démarche rigoureuse, toujours inchangée: quelques lignes d’introduction, puis la nomenclature de la métropole et des districts, puis la description détaillée, district par district. Enfin, un second développement regroupe les traits généraux de la province conçue comme un tout: là se retrouve le programme indiqué plus haut, qui vise à donner de l’ensemble géographique décrit une vision totale. Le cadre une fois tracé, l’œuvre vaut surtout par un extraordinaire accent de vécu. Sans doute cette observation personnelle (‘iy n ), dont Muqaddas 稜 a fait le point central de sa démarche, reflète-t-elle moins de talent, moins de spontanéité peut-être que celle d’Ibn ネawqal. Il reste que le tableau ressortit bien à la même veine: la meilleure, incontestablement, de cette géographie qui voulut se faire sur le vif.Enfin, la culture de Muqaddas 稜 englobe l’ensemble de ce bagage intellectuel (adab ) de l’honnête homme, inséparable, pour qui veut écrire, du goût d’écrire bien. Plus encore qu’avec Ibn ネawqal, la géographie affirme ici ses intentions littéraires. Sans doute ne devons-nous pas juger sur les résultats: à ce jeu de la littérature (et même de la poésie, en fin de livre), Muqaddas 稜 s’essouffle souvent; mais seul compte le souci de sanctionner la géographie comme œuvre littéraire autant que comme science. Jamais, après Muqaddas 稜, la géographie arabe, malgré ses productions monumentales, n’atteindra ce degré suprême de conscience, lié peut-être, en dernière analyse, à la perception d’un empire que les siècles d’après l’an mille allaient disperser, dans la réalité de l’histoire comme dans l’esprit des hommes. Muqaddas 稜 entendait, de son propre aveu, écrire pour tous et faire œuvre durable: mais son empire vit déjà, comme tel, depuis deux siècles au moins dans l’histoire, et l’histoire l’a déjà condamné au moment où il écrit sa géographie totale.
Encyclopédie Universelle. 2012.